C'est reparti pour une semaine de défilés haute couture, la Fashion Week est de retour à Paris. Et la tendance est à la mode responsable. L'ONU s'est carrément emparé de la question et a rassemblé en début d'année les acteurs majeurs du secteur. L'objectif est de ralentir les émissions de cette industrie qui pourrait peser pour le quart du bilan carbone mondial d'ici 2050.

L’ONU s’intéresse à la mode… et c’est une question majeure ! En début d’année, le département Changements climatiques de l’organisation mondiale a organisé pendant deux jours une session de travail avec les représentants de cette industrie. L’objectif est de réduire les émissions de gaz à effet de serre du secteur qui est la deuxième industrie de la planète en matière d’émissions. À l’heure actuelle, elles atteignent 1,2 milliard de tonnes par année et dépassent celles de tous les vols internationaux et de la navigation maritime combinés. Elles augmenteront de plus de 60 % d’ici 2030.
"Pour changer les choses, nous devons faire un choix : nous pouvons continuer comme si de rien n’était et espérer survivre aux conséquences. . . ou bien nous regarder dans le miroir et admettre que nous avons besoin d’un changement radical et profond", a déclaré Patricia Espinosa, secrétaire exécutive de l’ONU Changements climatiques. "Ce changement doit venir de toutes les personnes et de tous les secteurs du monde des affaires, y compris du secteur de la mode." 
Parmi les pistes envisagées lors de cette rencontre, il y a la concertation régionale avec les sous-traitants de l’industrie de la mode, le renforcement de l’engagement avec les décideurs politiques dans le cadre de l’Accord de Paris, le développement d’une communication commune ou encore la mise en place d’une plateforme en ligne pour rassembler les différentes initiatives en matière d’environnement.
Pas de refonte du modèle économique
Il faut dire que ces dernières sont nombreuses et disparates. Il y a par exemple la Sustainable Apparel Coalition (SAC) qui développe le Higg Index, un indice censé mesurer la transparence des marques sur le plan environnemental et social. Il y a aussi Act (Action Collaboration transformation) qui travaille sur le salaire décent dans la chaîne de sous-traitance. Ou encore ZDHC (Zero Discharge of Hazardous Chemical) qui vise à éradiquer les produits chimiques dangereux de l’industrie textile.
Puma, H&M, Adidas, C&A, Primark, Inditex (Zara), Kering ou encore Nike font partie des marques que l’on retrouve en première ligne. "Il est intéressant de voir que les approches collaboratives se développent car les problèmes auxquels nous faisons face sont globaux, analyse Rémi Crinière, responsable Développement durable chez H&M France. De plus en plus d’acteurs ont compris qu’on ne pourra pas les régler tous seuls chacun de son côté. Il faut désormais convaincre au-delà de ce cercle." 
Mais si ces accords vont dans le bon sens, "ils servent surtout aux marques pour dire qu’elles ne font pas rien", estime Nayla Ajaltouni du Collectif Éthique sur l’étiquette. "Ces bonnes pratiques ne mènent pas à une refonte des pratiques d’achat et du modèle économique de ces entreprises qui est fondé sur une minimisation des coûts de production et une main-d’œuvre majoritairement exploitée au service de l’industrie textile." 
500 milliards de dollars de pertes par an
Selon elle, c’est au consommateur de faire pression. "On repère un écho de plus en plus important du grand public sur les conditions de travail et la face cachée de la mode. Cette prise de conscience doit désormais se traduire dans les pratiques d’achat", poursuit Nayla Ajaltouni.
Les investisseurs ont également un rôle à jouer. Fin janvier, une coalition de 147 investisseurs représentant 3 700 milliards de dollars d’actifs ont appelé les marques à prolonger leur engagement dans l’accord sur les incendies et la sécurité des bâtiments au Bangladesh, mis en place après l’effondrement du Rana Plaza de 2013. Pour le moment, seules 60 entreprises sur les 220 signataires ont donné leur feu vert à l’extension du programme jusqu’en mai 2021.
Dans un rapport (1) publié en novembre dernier, la Fondation Ellen MacArthur estime que chaque seconde c’est l’équivalent d’un camion de vêtement qui est mis en décharge ou brûlé. En valeur, ce sont ainsi 500 milliards de dollars qui partent en fumée chaque année en raison de vêtements "peu portés et rarement recyclés". Cela pourrait conduire le secteur à peser le quart du bilan carbone mondial d’ici 2050.
Concepcion Alvarez @conce1
(1) Voir le rapport de la Fondation MacArthur    

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